DES NÉGOCIATRICES EN SIMULATION DE COP CLIMAT A KINSHASA .


   Trois jours d'immersion dans les réalités des négociations pour permettre aux futures négociatrices des pays francophones de maîtriser les techniques de débats dans les conférences internationales sur le climat. La simulation a été l'un des points clés de l'atelier de formation organisé du 14 au 17 octobre 2024 à Kinshasa par l'Institut de la Francophonie pour le Développement Durable (IFDD).


      La Cop 29 de Baku en Azerbaïdjan va se tenir du 11 au 22 novemvre 2024. Après avoir pris le soin d'outiller les négociatrices avec des connaissances historiques, des méthodes et astuces pour leur permettre d'être à l'aise dans les discussions à l'international, les formateurs leur ont précisé que leur rôle commence une semaine avant la date officielle de la Cop, c’est-à-dire dès le 04 novembre qui est considérée comme la semaine des négociations, durant laquelle les deux principaux points de discussion qui intéressent l'Afrique et que sont l'atténuation et le financement seront mis sur la table des débats.

     Il leur faudra donc bâtir des positions, trouver des argumentaires ou apprêter des écrits, surtout que les interventions en salle comptent énormément pour les différents groupes qu'on représente. Les femmes négociatrices pourront, avec un peu de courage, prendre la parole en salle afin de soutenir leur groupe d'appartenance, tout en gardant à l'esprit que les discussions se tiennent en anglais, ce qui pourrait constituer déjà un grand problème pour les pays francophones. 

    


      Pour y arriver, les exercices de simulation ont constitué le point le plus important de la formation de Kinshasa. La salle de conference du Fleuve Congo Hôtel s'est transformée en salle de négociation aux Conférences des Parties, le temps de l'atelier. 
    D'un côté les co- chairs ou co-présidents, représentés par les experts Mamadou Honadia, Lalaina, Ludovic Bechard et Ibila Djibril, qui ont joué ce rôle autant pour le Programme de travail sur l'atténuation que pour celui sur la finance.         De l'autre côté les négociatrices en herbe qui se sont réparties en groupes représentant différents pays et les coalitions, à l'instar de l’Union européenne, le Groupe Afrique, le Groupe Arabe, le Groupe des Pays les Moins Avancés(PMA), le Groupe Composite ou Parapluie, le G77 et la Chine, le Groupe Afrique des Négociations (AGN), les Petits États Insulaires, le Groupe de pays en développement animés du même esprit(LMDC), le Groupe de l'intégrité environnementale, l'Association indépendante de l'Amérique latine et des Caraïbes(AILAC), entre autres.

      Concernant le Programme de travail sur l'atténuation, on a pu voir la représentation miniature de ce qui se passe à l'international. Les femmes ont gardé à l'esprit deux idées importantes : Premièrement, l'existence des deux grands Groupes des négociations, constitués des pays développés menés par les États-Unis et les pays en développement menés par la Chine. Deuxièmement, l'objectif global de réduction des émissions de gaz à effet de serre qu'on est loin d'atteindre, couplé aux engagements des pays en développement et les moins avancés, à travers les Contributions Déterminées Nationales (CDN).

  


     Les femmes du Groupe Afrique, le G77 et la Chine, des PMA et de l'AGN ont ainsi réfuté les arguments émis par l’Union européenne et les États-Unis, car ils ne respectaient pas leurs intérêts. Ce qui a créé un blocage, illustré par des voix élevées qui fusaient dans la salle, chaque groupe cherchant à se faire entendre. Les co-présidents ont dû ramener de l'ordre en proposant des concertations afin de trouver des consensus qui pourraient constituer des demi victoires pour les unes et les autres. 

      La simulation du Programme de travail sur la finance aura été la plus houleuse. Les PMA, le Groupe Afrique, l'AGN et les Petits États Insulaires qui sont ceux qui polluent le moins mais qui sont les plus affectés par les impacts des changements climatiques, attendent en vain depuis des lustres des moyens de financement de leurs politiques d'adaptation et d'atténuation. Il fallait donc connaître les arguments qui, partant de la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques à l'Accord de Paris, ont fait en sorte de ne pas mobiliser les financements attendus. Mais aussi avoir les arguments qui permettent aux pays en développement de réclamer les ressources financières. 

    Les unes et les autres, connaissant désormais les enjeux se sont livrées une bataille, chacune ne voulant lâcher aucun point pour que la position de son groupe ne soit pas prise en compte. Ici également, une entente a été difficile. Au regard des arguments divergents, la nécessité d'un consensus s'est avérée évidente. Surtout que d'après Ibila Djibril, 《ce sont nos populations qui souffrent à la base et il ne serait pas bon de rentrer d'une conférence internationale en disant que c'était un échec total. Autant faire des concessions sans totalement perdre la face, pour arriver à un accord qui puisse permettre la résolution du problème en débat 》. 



      Les femmes ont tellement bien joué le jeu, au grand plaisir des formateurs pour qui cet atelier en RDC aura été un succès. Ibila Djibril pense que《 les négociatrices ont compris la philosophie derrière chaque grand Groupe. Elles ont donc cherché à maîtriser parfaitement les discussions propres aux pays en développement. C'était un plaisir de les voir autant passionnées dans les débats 》. Les simulations ayant été bien maîtrisées à Kinshasa, Mamadou Honadia souhaite que 《60 à 70% des femmes qui se rendront à la Cop29 à Bakou puissent prendre la parole au moins une fois dans les discussions, même si c'est juste pour soutenir un point de vue de leur groupe d'appartenance》

     Elles ont tout intérêt à prendre la parole dans les débats, car les études de vulnérabilité dans les pays en développement ont montré qu'au rang des groupes de personnes les plus touchées par les impacts des changements climatiques, il ya les jeunes, les vieilles personnes et surtout les femmes. Il faut donc leur donner l'opportunité et la parole, pour qu'elles puissent défendre leur point de vue à l'international où les partenaires sont susceptibles de les écouter. C'est l'occasion que l'Institut de la Francophonie pour le Développement Durable donne depuis 2018 aux femmes des pays francophones à travers une série de formations à leur intention. 

                                  Line Renée ANABA 

      


 

      


Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

LA NÉGOCIATRICE DE LA CAUSE DE L'EAU POUR LA TUNISIE.

KINSHASA : L'IFDD FORME LES FEMMES AUX NÉGOCIATIONS CLIMAT

DES NÉGOCIATRICES FRANCOPHONES PRÊTES POUR LA COP29 DE BAKU